Seules les âmes très fortes peuvent supporter les grandes solitudes.

– Victor Cherbuliez

Parfois il nécessaire de quitter la foule et la folie océane pour aller se ressourcer, faire le point, se recentrer intérieurement.

Si le sport est un excellent moyen d’y arriver, d’ arrêter sa pensée compulsive, pour laisser place à des pulsions plus instinctives, exemptes de toute réflexion, innées voire animales – la « retraite » l’est aussi ! Attention, je ne parle de me retirer dans un couvent ou effectuer un stage organisé. Non, je parle simplement ici de retraite hors de la civilisation, loin du stress pour aller écouter le silence.

Combiner les 2, c’est le luxe suprême, solitude et randonnée mon combo idéal.

Partir, ce n’est pas forcement aller très loin. Si l’océan m’apaise, la montagne à sur moi un effet plus réparateur. Je marche des heures et des jours entiers, seul face à ma conscience. Certains y voient une sorte de Vipassana… Pour le béotien, et pour comprendre le pourquoi du comment, Vipassana (dans les grandes lignes) est une retraite de tradition bouddhiste basée sur la méditation, hors de portée de tout ce qui peut venir t’empêcher d’être seul face à toi… tout est interdit, téléphone, ordinateur, livre, nourriture, jusqu’au papier et crayons qui pourraient te permettre de te parler à toi même.

Je ne suis pas aussi ayatollah que ça ! Je ne me prive que de la connexion internet, ce qui est déjà beaucoup. Et pour tout te dire, la solitude est vraiment un aspect de la vie que j’ai appris à cultiver au fur et à mesure des épreuves. Je t’en parlerai plus longuement une autre fois !

Alors me voilà parti de Biarritz après quelques jours de chasse à la vagues. Direction le pays basque espagnol, l’Euskadi, la vraie –  Hondarribia, à une cinquante de kilomètres de là, et environ 1h45 de route ! Je ne prends jamais l’autoroute, tu le sais, Marcel en est phobique avec ses seulement 3 vitesses. Quel plaisir de longer la côte, traverser les petits villages Guethary, Saint Jean de Luz, Ciboure, Socoa. Je te recommande cet itinéraire, évite toi aussi l’autoroute, tu ne profiterai pas d’une des plus jolies vues de la côte basque que t’offre le trajet de la Corniche entre St Jean de Luz et Hendaye. Cette route est sublime, en hauteur, tu surplombes l’océan avec des vues féériques sur la baie d’Hendaye. Arrête toi pour profiter un instant de la vue !

La Corniche, route d’Hendaye

Mon point de chute est le Faro de Higuer (le phare du Figuier) …  vue à couper le souffle, à 360° sur l’océan – le lieu lui l’est un peu moins. Un parking de pleine campagne, non loin du camping du même nom. Ici fin septembre, c’est sauvage, tu n’es pas dérangé par la foule des badauds. Quelques bars moitié branlants se partagent le spot… et une station d’épuration non loin, tout prés de l’océan.

C’est une coquetterie espagnole, installer des stations de retraitement, des usines ou des centrales nucléaires (si si !) les pieds dans l’eau ou dans un site naturel incroyable. Je t’avoue que je n’y ai jamais rien compris ! A croire que les espagnols qui pourtant passent du temps à marcher dans la nature n’ont absolument aucune conscience environnementale. C’est un autre sujet !…. mais je te livre tout de même mon impression.

L’espagnol n’est absolument pas respectueux de la nature en général. Autant il est gentil, serviable et agréable, autant c’est le plus gros porc qu’il m’est été donné de voir. Partout où tu passeras tu ne pourras pas t’empêcher de le remarquer, si tu es comme moi à cheval sur l’écologie, ou plus simplement respectueux de la nature. Des immondices et des détritus jonchent le sol où que tu sois !

Prend garde néanmoins, ne te rend pas malade avec çà, sinon tu ne feras rien en Espagne. Pire encore tu fuirais et rayerais ce pays de ta TO DO LIST.

Une astuce courante – nous sommes maintenant de plus en plus nombreux à adopter cette méthode – consiste à nettoyer les alentours de ton campement lorsque tu y arrives… c’est un minimum, une goutte d’eau, mais si tout le monde fait de petits gestes alors un jour TOUT changera.

Ceci étant dit, tu passeras un bon moment sur ce spot.  Il est le point de départ de nombreux sentiers de randonnée, dont le fameux GR121 qui te conduit d’Hondarribia jusqu’ à Pasaia en longeant la ligne océane. C’est celui ci que j’emprunterai demain matin.

Commence par observer  le coucher du soleil depuis le pied du phare et de le suivre disparaître derrière la côte rocheuse. Ce spectacle est magique, envoutant, comme je les aime. Sur ce spot pas de souci, pas de bruit, tu peux dormir sur tes 2 oreilles !

Sunset depuis le Phare du Figuier

Au petit matin, emprunte le GR121 qui commence dés la sortie du parking, un petit chemin de terre, puis très vite des chemins rocailleux assez escarpés… le temps sec est a privilégier. Tu peux suivre ce chemin côtier jusqu’à Pasaia et continuer encore plus loin si ce paysage te convient.

Cependant, je te conseille de dévier ton chemin de l’océan après quelques kilomètres pour prendre la direction du fort de Guadalupe ce qui te permet d’accéder au Jaizekebel, le point culminant de la montagne sur laquelle tu es en train de grimper !

Le paysage change très vite, tu t’enfonces dans la foret, et tu commences a ne plus croiser personne – même si le chemin côtier est très peu fréquenté a cette période – tu commences aussi a grimper, insidieusement, mais tu le sens dans les jambes.  Ah oui, j’ai oublié de te dire, à cette saison, équipe toi d’un sac en tissu pour ramasser les châtaignes. Le chemin jusqu’au fort traverse une forêt de châtaigniers… tu commenceras à les percevoir dés que tu passes le ruisseau de montagne. Ne fait comme moi ne t’arrête pas des que tu vois les premières, il y en a des tonnes juste après encore plus grosses et plus facile à ramasser ! Je te l’avoue je me suis pressé de ramasser les toutes premières que j’ai trouvées sur mon chemin tellement j’étais frustré de ne pas avoir pu en ramasser dans les bois vers chez moi – probablement dû à la sécheresse du printemps et de l’été. Si tu aimes les châtaignes fonce au Jaizekebel ! Tant que j’y suis je te donne un autre spot au pied de la Rhune, mais je t’en dirai plus dans le chapitre consacré a cette balade !

Bientôt tu arrives au fort de Guadalupe, ou plutôt une église car ici tu es sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle. Curieusement après plusieurs heures de calme et de silence tu commences à croiser du monde ainsi que des groupes d’enfants qui viennent souvent faire des activités péri-scolaires sur ce lieu. Point positif tu pourras te ravitailler en eau !

Je décide de continuer mon périple, n’ayant pas assez de marche dans les pattes, pour commencer à gravir plus sérieusement le Jaizekebel. Je n’irai pas jusqu’en haut cette fois n’y  n’en ferais le tour non plus. Je continue quelques kilomètres encore pour pouvoir me poser en hauteur en surplomb de la ville d’Hondaribia. Pause déjeuner et vol en drone pour immortaliser le moment. Le ciel est chargé mais la vue sensationnelle, le sentiment de liberté incroyable. Je repars ensuite par le même chemin pour regagner mon campement et partir vers le deuxième point de chute de mon périple, celui-ci devrait être encore plus calme.

Hondarribia depuis le Jaizekebel (image drone)

Presque 5 heures de marche plus tard me revoilà au volant de Marcel direction l’ Embalse de Anarbe… pourquoi ? Je ne sais pas. J’ai repéré ce grand lac sur la carte, idéal pour de grandes balades en paddle.

La route est longue, très longue… la nuit tombe vite dans la montagne. N’arrivant pas à trouver le chemin pouvant m’amener au bord du lac, je décide de mettre le GPS…. Mauvaise idée ! Il me conduit sur une piste en montée abrupte… je renonce… et décide de rejoindre le village le plus proche Arano. Sur le moment, les quelques kilomètres reliant le village me paraissent interminables tellement il y a de lacets et tellement la route est abrupte…Marcel peine, je fatigue aussi.

Arrivée dans le village…. Je ne vois pas à 2 mètres … la brume montagneuse s’est installée. Juste après l’église je trouve un parking en terre surplombant les prés… je m’y arrête, seul dans cette nuit noire… je ne sais pas où suis-je mais ce qui est sûr c’est que je ne serai pas dérangé  par la foule là aussi, la retraite s’annonce plutôt pas mal !

J’installe tout mon fatras, prend le temps de me faire un petit plat pour me remettre de la marche du jour, hop un livre et au lit ! Crois le si tu veux, mais il ne s’était pas écoulé  30 minutes que des bruits bizarres se font entendre, des bruits de pas autour du camion. Frigorifié je ne sors pas de suite mais éclaire par la vitre arrière avec ma torche. Les pas s’arrêtent, puis reprennent ainsi à plusieurs reprises. Exaspéré, je sors ! Et là, je tombe nez à nez avec des pottoks qui n’avaient rien trouvé de plus amusant que de venir se frotter à mon van.

En fait je me trouve en plein milieu de leur passage habituel, et un basque qui plus est un pottok, c’est cabochard ! Je les laisse à leurs jeux nocturnes et retourne me coucher ! Le silence de la nuit est assourdissant, comme je l’aime.

Le petit matin pointe le bout de son nez, le spectacle est indescriptible, une mer de nuages monte peu a peu rejoindre la brume sur les hauteurs de la montagne.

Thé à la main je suis médusé devant ce que la nature m’offre ce matin, comme si elle me remerciait d’avoir fait tout ce chemin pour venir jusqu’à elle !

Réveil à Arano

Que faire maintenant, je ne peux me satisfaire de cet emplacement, sympa, mais moi ce que je veux c’est faire du paddle sur le lac ! Je descends quelques centaines de mètres plus bas au seul café du village. Au comptoir, p’tit noir entre les mains j’échange avec le bistrotier qui n’a pas l’habitude de voir des touristes et donc qui parle un anglais encore plus approximatif que le mien !

A force d’insister nous y arrivons, il déploie une large carte et m’explique que …. ben tu l’auras peut être deviné, mais pas de paddle …. Le lac est accessible uniquement en 4X4 surdimensionné ou à pieds, mais la balade est extrêmement longue. Je me résigne donc pas de campement au bord du lac … pas de feu de camp non plus et encore moins de paddle.

Mais, il y a toujours un mais heureusement dans une histoire, le village dans lequel je me trouve est le dernier sur la ligne de crête, la route s’arrête, et ici c’est le paradis du VTT, moto cross et randonnées ! Putain c’est bon c’est le paradis ! Et le cafetier de m’indiquer que quelques centaines de mètres plus haut se trouve un parking au pied du départ de toutes les pistes.

Ni une ni deux, je fonce avec Marcel vers cette terre promise. Sur le chemin, je dépasse une église abandonnée – San Roke Ermita – je décide de m’y arrêter et d’y installer mon campement. Je vais explorer le parking plus loin en VTT, aucun intérêt, des cailloux et seulement des cailloux !

Le spot est tout simplement mystique, je te le recommande les yeux fermés ! J’y ai passé 3 jours et 2 nuits magiques. Je n’ai croisé personne et personne n’est venu à ma rencontre. Silence, quiétude, pas d’ internet !

San Roke Ermita – Arano

Le premier jour ascension en VTT… j’en ai encore mal aux mollets en écrivant ce texte… à dire vrai les pistes sont plus accessibles en moto cross… tu traverses des champs, des passages canadiens, tu montes encore et encore, tu poses pieds à terre, tu pousses, tu pestes, tu râles… et comme a chaque fois tu te demandes pourquoi tu t’affliges tant de souffrance. En fait si tu pratiques le  VTT en montagne, tu le sais, tout ça c’est pour la descente ! Celle qui t’envoie tellement d’adrénaline que tu es capable de te péter les jambes et le cerveau à grimper pendant des heures !

J’ai investi dans une douche solaire Décathlon avant de partir de Biarritz, mais ce soir je n’arrive pas à la prendre… la montagne est fraîche, il ne fait que quelques degrés. Je vais passer une nuit magique, rythmée par le bruit du vent dans les branches, par les cris des animaux, et les mort vivants qui m’enveloppent. Non je déconne ! Je te dis ça car plusieurs personnes m’ont dit qu’ils n’auraient pas pu dormir si proche de l’église…. Ça m’a traversé l’esprit c’est vrai ce premier soir… j’ai fermé Marcel à double tour !

Réveil 5h du mat. Une fois n’est pas coutume, le réveil valait tous les sacrifices du monde.

Face à moi, une mer de nuages encore plus majestueuse que la veille… je cours dans la rosée scruter son ascension et bientôt ensevelir les massifs avoisinants. Un petit vol de drone aussi, quelques images, je te les montre en suivant, même si leur qualité n’est pas géniale, ce drone est un jouet plus qu’un appareil photo.

San Roke Ermita – Arano

Et je pars marcher encore ! Mon activité des 2 jours suivants. En pleine conscience et avec  toujours le même rituel – mon sac sur le dos, mon casse croute – méditation, introspection, farniente. Tu prends le temps de vivre, de te reconnecter avec ton TOI.

Je peux te le garantir, d’une part la solitude t’oblige à faire le point, t’oblige à trouver des réponses à tes questions et d’autre part, la montagne, la nature, la rudesse de la randonnée t’oblige à passer outre et trouver des solutions, à te recentrer. Tout se passe comme si tu avais fait ton chemin de pénitence… Tu as analysé, tu as compris, tu t’es pardonné ! Des portes se sont fermées définitivement  et tu es prêt dorénavant  à en ouvrir d’autres, encore plus belles, car tu sais, dans ce genre de retraite, si tu ne comprends pas, alors ton esprit te lâche et tu abandonnes.

Va au bout, fait ce cheminement intérieur, la montagne est un prétexte, elle te permet de devenir plus fort, d’apprendre de toi et sur toi… si tu vas au bout tu apprécieras d’autant plus ton roadtrip, et je te le garantis tu feras comme moi, tu galoperas vers le prochain !

Tips
☞ Le spot El Faro de Higuer
Coordonnées GPS : 43°23’29.0″N 1°47’35.1″W
Lien Google Maps : https://goo.gl/maps/LSatvGnMhdM2
☞ Le spot Arano, San Roke Ermita
Coordonnées GPS : 43°11’35.6″N 1°53’33.0″W
Lien Google Maps : https://goo.gl/maps/4jLgevz2prH2